La campagne, lieu d’innovation pour les activités liées à la transition

Le réseau Envie d’R a animé une table ronde intitulée “La campagne : un territoire d’innovation en matière de création liées à la transition” lors du Forum de l’Entrepreneuriat de Saint Etienne le 1er juin 2023.

Au cœur de la discussion : vivre sa transition écologique dans le rural, Elsa Paput, qui accueille les nouveaux entrepreneurs à la Communauté de Charlieu Belmont, et Simon Constans, entrepreneur créateur de Weko et de l’hébergeur ResiLien, installé dans un village rural de la Loire, nous apportaient leurs points de vue croisés sur le rural comme terreau d’entrepreneuriat écologique.

Nous zoomons ici sur le témoignage de Simon et son parcours entre urbain et rural, entre informatique et écologie.

Simon de WEKO

Envie d’R : « Simon, parlez-nous de votre parcours personnel. Comment avez-vous atterri dans la Loire ? »

Simon : « J’ai grandi dans la Loire, à Crémeaux (1000 habitants). Après avoir fait mes études à Saint-Étienne, dans la Creuse (Guéret, Limoges, Aubusson), puis mon école d’ingénieur à Bordeaux et Paris, j’ai fait mon début de carrière à Paris dans une grosse entreprise informatique. Voyant que ce n’était pas ce que je voulais faire, j’ai préféré travailler dans des petites startups, qui ont vite décollé. Ma première mettait en relation des développeurs informatiques (nous) avec des clients qui voulaient des sites web mais nous travaillions de façon très ouverte avec les méthodologies Agile. Ma compagne était en freelance, elle travaillait pour des clients à distance. Au bout de quelques années, nous voulions partir de Paris. J’ai trouvé une société en tant que développeur pour travailler sur un logiciel Open Source Cozycloud, une alternative aux outils des GAFAM, l’équipe était organisée depuis 5 ans à travailler à distance. Après 2 ans de nomadisme, nous nous sommes finalement posés dans mon territoire d’enfance. On savait que la fibre arrivait : nous nous sommes installés fin 2017 et la fibre est arrivée début 2018. C’est une chance d’être dans la Loire, qui a été fibrée par le Département (SIEL), comme c’est le service public qui a installé la fibre, tous les habitants y ont accès. Clairement, les choix politiques locaux ont une influence : on ne se serait pas installés dans le coin sinon.

 

Envie d’R : « Bien choisir son territoire rural d’atterrissage, c’est essentiel. Parlons de transition écologique. Comment l’écologie percute ou rejoint votre parcours professionnel ? Et comment vous envisagiez votre impact écologique sur le territoire rural où vous arriviez ? »

Simon : « Lors de notre installation dans la Loire après 2 ans de nomadisme, notre conscience écologique avait progressé, nous avions visité des endroits magnifiques mais aussi des endroits pollués, nous avions envie de vivre de façon Zéro Déchet. Mon souhait professionnel était d’avoir un impact écologique plus positif, je voulais arrêter l’informatique. J’ai envisagé de me reconvertir dans une activité de consigne de bouteilles avec Réseau Consigne, mais sur un territoire reculé il n’y a pas assez de personnes pour rentabiliser. Malgré tout, j’avais aussi une passion pour l’informatique ! Développeur web à la base, j’ai voulu aider les projets écologiques qui font l’inverse de l’écologie en matière d’informatique. J’avais accumulé de l’expérience pour proposer une informatique alternative.

Au final j’ai créé Weko avec l’aide de Ronalpia un incubateur dans l’ESS, une activité de développement web et applications mobiles, alternative permettant d’avoir un faible impact énergétique. Je suis aussi conférencier et formateur sur la pollution liée au numérique, je fais du conseil et de l’accompagnement. J’ai aussi co-créé l’hébergeur RésiLien , qui fait de l’hébergement d’outil Open Source, nous faisons partie du Collectif des Hébergeurs Alternatifs les « CHATONS ».

Le respect de la vie privée, le partage et la collaboration de code source, rendre l’informatique plus accessible sont des valeurs que j’essaye de prôner autour de chez nous et qui sont une continuité de ma prise de conscience écologique dans le monde de l’informatique.

Envie d’R : « Nous pouvons en retenir qu’en allant vivre à la campagne il ne faut pas forcément jeter le bébé (métier, compétences, réseau, expérience) avec l’eau du bain (vie urbaine). Mais quand on vient s’installer en rural, on n’est pas qu’entrepreneur, on vient aussi – et surtout ? – installer sa vie personnelle, sa vie de famille. Quelle relation avez-vous développée au territoire ? Comment vous êtes-vous inséré ? »

Simon : « En venant vivre ici, notre autre but était de nous investir localement. Nous avons beaucoup de proches qui viennent nous voir et nous sommes bien occupés. Mais en vivant dans une maison isolée, sans voisins, ça manquait d’avoir des contacts locaux. Nous nous sommes investis dans beaucoup d’associations différentes, dans la municipalité, dans un projet de centrale électrique citoyenne, d’achat groupé de produits alimentaires. Les enfants nous permettent aussi de créer des relations »

Envie d’R : « Et quel est votre lien au territoire pour l’activité professionnelle ? »

 Simon : « Par exemple c’est moi qui ai fait le site de la municipalité de Crémeaux. J’ai beaucoup de contacts locaux que nous nous sommes faits avec les différentes activités dans lequel nous nous sommes investis. Le bouche à oreille et les réseaux dans lequel nous sommes rentrés permettent de toucher des clients très différents : municipalité, regroupement de maisons de santé, arboriculteur, agence de communication… »

Envie d’R : « Effectivement, cela renforce un constat que font les membres d’Envie d’R : Se connecter au territoire est crucial, et les nouveaux arrivants doivent être proactifs. En l’occurrence, vous avez été très dynamiques ! Nous constatons aussi que les territoires peuvent être plus ou moins accueillants. Les chargés de mission des collectivités membres d’Envie d’R mettent en lien les nouveaux arrivants et les créateurs d’entreprises avec de nombreux interlocuteurs locaux, des associations, des financeurs, et d’autres entreprises. Est-ce que ça vous parle cette idée de ne pas rester seul dans son démarrage d’activité ? »

Simon : « Oui, complètement. Weko bénéficie de 3 réseaux :

  1.  les Collectifs des Hébergeurs Alternatifs « les CHATONS », plutôt un réseau métier où les collectifs coopèrent,
  2.  la municipalité et la centrale électrique,
  3. Ronalpia (qui a accompagné la création de Weko) et la Coopérative d’Activités et d’Emplois Cap Services (qui porte l’activité de Weko) : cela m’a permis d’entrer en relation avec d’autres entrepreneurs qui font d’autres métiers et qui sont devenus des amis pour certains, et de rencontrer des présidents des Communautés de Communes.

Envie d’R : « Merci beaucoup pour ce témoignage Simon, et longue vie à Weko et ResiLien ! »